LANGUES, ÉCRITURES, et CIVILISATIONS ANCIENNES

Concernant le linéaire A, le but est triple :
- Montrer qu’il y avait déjà une présence mycénienne / grecque en Crète, dès le Minoen Récent I, et que ces Mycéniens / Grecs utilisaient l’écriture linéaire A pour transcrire leur propre langue.
- Montrer qu’il y avait également une présence hourrite en Crète à l’époque minoenne.
- Vérifier si le linéaire A note aussi une langue sémitique (le cananéen ancien), opinion de Luciano Pavarotti.
Concernant les civilisations anciennes, ce blog ne se limite pas à la minoenne.

Copyright © Oksana Lewyckyj

dimanche 6 novembre 2011

Mal(l)ia













Pour répondre à une question qui m’a été posée sur le Forum Babel, par "Cananéen" on entend aujourd’hui les langues suivantes : l’hébreu ancien, le phénicien, le moabite, l’ammonite et la langue d’El-Amarna, voir image n°1.

Nous ne savons pas comment s’appelait le site minoen de Malia (Mallia) à l’époque des Premiers Palais. Toujours est-il que ce nom, Malia, apparaît pour la première fois sur un document, daté de 2100 av. J.-C., où les anthroponymes qui y figurent sont portés par des Amorites (BUCCELATI, G., The Amorites of the Ur III Period, Naples, 1966, p. 111).

D’après Gn 10, 15-19, les Amorites étaient un clan cananéen : « Canaan engendra Sidon son premier-né et Heth, le Jébusite, l’Amorite, le Guirgashite,le Hivvite, le Arqite, le Sinite, l’Arvadite, le Cemarite, le Hamatite. Les clans Cananéens se disséminèrent ensuite, et le territoire cananéen s’étendit de Sidon vers Guérar jusqu’à Gaza, vers Sodome et Gomorrhe, Adma et Cevoïm jusqu’à Lèsha ».

S’il est bel et bien porté par un Amorite dans le document YBC 3635, le nom « Malia » pourrait, cependant, avoir une autre origine : akkadienne selon Bucellati (p. 123), hourrite selon d’autres.

En effet, « Malia » apparaît également comme anthroponyme dans les Archives royales de Mari (voir image n°3). J.R. Kupper écrit, dans son article Les Hourrites à Mari, dans Revue Hittite et Asianique, tome 36, Paris,1976, qu’un personnage dont le nom est sans doute hourrite, Maliya, exerce un commandement à l’armée du temps de Samsi-Addu (voir image n°4). A la page 126, il indique également que ce nom est très fréquent à Nuzi. On le trouve, en effet, à trois reprises à Nuzi chez M.P. Maidman (voir image n°5), et vingt-neuf fois chez GELB, I.J. – PURVES, P.M. – MAC RAE, A.A., Nuzi personal names, Chicago, 1963, p. 95 (voir image n°6).

A la fin du XVIème siècle av. J.-C., un théonyme « Malia » est attesté comme divinité des bosquets et des vignobles dans le sud de l’Anatolie.

On trouve aussi « Malia » à Ougarit (GRÖNDAHL, F., Die personennamen der texte aus Ugarit, in Studia Pohl 1, Päpstliches Bibelinstitut, *, 1976, p. 159).

Dans les sources grecques, enfin, « Malia » est connu comme nom de lieu, mais avec la particularité d’être un nom … carien (ADIEGO, I.J., The Carian Language, with an appendix by Koray Konuk, in Handbook of Oriental Studies. Section one : The Near and Middle East, vol. 86, Leiden/Boston, Brill, 2007, p. 457 : Appendix C. Carian names in Greek sources. A. Place Names.

Conclusion

Des choses certaines, nous savons qu’un Amorite portait le nom de « Malia » à l’époque d’Ur III (vers 2100 av. J.-C.). Nous savons également que les premiers palais sont apparus en Crète vers 2000 av. J.-C., dont celui de Malia, détruit en 1700 av. J.-C.
Si le nom antique du site était déjà « Malia » à l'époque des Premiers Palais, il ne pouvait, en aucun cas, provenir de la divinité hittite, qui, elle, n’est apparue sur la scène que quelques six siècles (500 ans) plus tard.


L’image n°1 provient de HETZRON, R. (ed.), The Semitic Languages, 1998 (first published 1997 by Routledge), p. 6.
L’image n°2 est tirée de WARREN, P., The Making of the Past : The Aegean Civilizations, Elsevier/Phaidon, 1975, p. 41.
L’image n° 3 est extraite de BIROT, M.- KUPPER, J.-R., ROUAULT, O., Répertoire analytique(2e volume). Tomes I-XIV, XVIII et textes hors collection. Première partie : Noms propres, dans Archives Royales de Mari, publiées sous la direction de André Parrot et Georges Dossin, XVI/I, Paris, Geuthner, 1979, p. 148.
L’image n°4 est extraite de KUPPER, J.R., Les Hourrites à Mari, op. cit.
L’image n°5 provient de MAIDMAN, M.P., Joint expedition with the Iraq Museum at Nuzi VIII. The remaining major texts in the Oriental Institute of the University of Chicago, in Studies on the civilization and culture of Nuzi and the Hurrians, volume 14, edited by David I. Owen and Gernot Wilhem, CDL Press, Bethesda, 2003, p. 35.
L’image n°6 a été prise chez GELB – PURVES – MAC RAE, Nuzi personal names, op. cit.

Pour empêcher la redirection de mon article vers une autre personne sur internet, je me vois contrainte de remplacer, dans ma bibliographie, le nom de la capitale italienne par un astérisque.

Tous droits réservés. Reproduction interdite.

Oksana Lewyckyj (alias "Didon" sur Babel)
2/503 Voie des Gaumais
1348 Louvain-la-Neuve
Belgique